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Interview de Arthur Ténor

 

Titre de son oeuvre : Les Voyages Extraordinaires

Genre : Fantasy, Science-Fiction

Date de parution : Deux premiers tomes du cycle déjà parus aux Editions Plon, le troisième étant prévu pour octobre 2008

Pour en savoir plus : le site officiel de l'auteur

Résumé du premier tome : (voir la critique)

Qui n'a pas rêvé de faire du tourisme dans un monde parallèle ? Depuis 2062 et la découverte des
tunnels quantiques, c'est possible ! Thédéric, jeune étudiant à la Sorbonne, s'inscrit ainsi dans une
agence de voyage pour partir en raid « émotions fortes » au royaume des 7 Tours. Le jeune homme n'avait pas prévu qu'à peine arrivé, sa promenade touristique en equined le cheval du coin tournerait au cauchemar…
En effet, le royaume des 7 Tours déclare la guerre à l'Immonde et empêche les touristes de rentrer chez eux. Voilà Thédéric embarqué dans une aventure fantastique et terrifiante, où il va devoir jouer un rôle essentiel, aux côtés de Lizlide, la belle elfle…

Titre des romans composants le cycle:

1- Voyage extraordinaire au royaume des sept tours

2- Voyage extraordinaire dans l'empire des mondes

L'interview :

Avant toute chose, nous tenons à remercier l'auteur pour avoir consacré du temps à cette interview, et avoir accepté avec beaucoup de gentillesse de répondre à nos questions. En lui souhaitant beaucoup de succès !

Sahagiel : vous avez navigué sur bien des genres pour maintenant essayer la Fantasy, en quoi l’imaginaire vous attire-t-il ?

Arhtur Ténor : j’ai été élevé « au biberon Tolkien ». Je veux dire que j’ai eu sur ma table de chevet les trois tomes du Seigneur des anneaux, de l’âge de 18 ans à 28 ans. On ne s’étonnera donc pas si j’ai fini par céder à la tentation de m’embarquer pour cette destination de l’Imaginaire. Pour répondre plus précisément à votre question, j’ajouterai ceci : la vie c’est bien, parfois même très chouette et je n’ai pas à me plaindre. Mais l’imaginaire ajoute un piment indispensable au plaisir de vivre. Grâce à l’imaginaire nous pouvons dépasser toutes les limites ; assister à des spectacles inouïs, visiter des mondes grandioses, partager des aventures absolument fabuleuses. Pourquoi s’en priver ?

Diverses influences se mêlent dans ce cycle, par exemple des échos de science-fiction, mêlés à une ambiance plus épique, quels éléments vous ont inspiré dans la rédaction ?

Cela faisait longtemps que je voulais me lancer dans un projet d’héroic fantasy, mais il me fallait trouver une porte d’entrée différente de celle que l’on trouve classiquement dans ce genre (Celle du Seigneur des anneaux, en fait). J’ai donc attendu, jusqu’à ce que je me souvienne d’une idée (un fantasme en vérité) qui m’avait traversé l’esprit voici bien longtemps : partir en voyage dans les mondes imaginaires, comme on découvre le monde réel. Puisque nous vivons en des temps où le réalisme et la science règnent en maître, il me fallait une crédibilité (pseudo)scientifique. C’est ainsi que, me projetant dans un avenir relativement proche (un siècle), j’ai imaginé qu’on avait découvert grâce à la physique quantique, ces « lieux » où l’esprit humain a engrangé les visions de son imagination. Il se trouve que mon héros visite dans son premier Voyage extraordinaire un monde à la Tolkien. Mais il aurait tout aussi bien pu partir sur le mont Olympe ou pour Cythère (l’île de la tentation).
Ainsi, le concept des Voyages extraordinaires permet-il, théoriquement, de toucher à tous les genres et tous les thèmes. Je verrai bien mon héros s’offrir une petite virée dans le Londres de Sherlock Holmes…

Dans le second tome, vous versez plus dans la science-fiction, en quoi était-ce important de constamment varier les ambiances ? Par ailleurs, que souhaitez-vous transmettre à travers ces aventures ?

Plus que changer, j’aime varier (les plaisirs). On remarquera dans ma bibliographie une grande diversité de genres, de thèmes, de lectorats… A ceux qui me disent « Tu te disperses », je réponds : « Non, je m’éclate ». Explorer sans cesse de nouveaux univers est pour moi une source permanente d’enrichissement. Ne vivre qu’avec un seul personnage, dans un seul univers, comme Agatha Christie, ne me convient absolument pas. Quant à l’autre question, ce que je souhaite d’abord transmettre, c’est du plaisir. Ensuite, pour les plus curieux, j’aime bien fournir matière à réfléchir. Dans le premier Voyage, je donne une vision du mal qui pourrait largement occuper une soirée dans un café philo. Dans le deuxième, il y aurait sans doute aussi de quoi méditer sur les perversions de la société humaine et son remède… la Sagesse !

Thédric Tibert évoque un héros pour le moins inhabituel, comment ce personnage vous est-il venu ? En lui conférant un tel caractère, à la fois naïf et décalé, souhaitiez-vous le rendre proche de vos lecteurs ?

Comme vous vous en doutez, il y a forcément un peu de moi dans ce personnage, un moi sublimé de héros qui n’a l’air de rien comme ça, mais qui est plein de ressources. Je dis ça parce que j’ai eu une scolarité un peu compliquée qui m’a fait douter de mes capacités. Finalement, quand on trouve SA voie, on se découvre des talents cachés qui font de nous le héros de notre propre vie. Thédric est en somme un héros ordinaire dans un monde extraordinaire. Cela me fait penser à ces gens « ordinaires » qui entrèrent dans l’armée des ombres, pendant l’Occupation, et se révélèrent être des héros d’une incroyable bravoure.
Thédric est effectivement plus proche du lecteur (et de son auteur) de par son côté anti-héros, mais ce n’était pas un souhait, juste une envie.

La première chose qui a attiré mon regard, en découvrant les Voyages Extraordinaires, fut la couverture, réalisée en images numériques par Thierry Humbert. Quelle importance accordez-vous à cette illustration, sur le plan marketing ?

Thierry Humbert était un ami d’enfance, un frère de cœur, qui est décédé en début d’année. Il s’était consacré à l’illustration numérique avec grand talent et je lui dois certainement une partie du succès des Voyages. La couverture du premier a fait l’unanimité et cela s’est retrouvé dans les chiffres de vente. Alors oui, il faut accorder une très grande importance à « l’habillage » du roman. Il m’est arrivé de voir un roman « massacré » par une mauvaise couverture. Tous les auteurs pourraient vous raconter l’effet d’une belle image, lorsqu’on observe l’attitude du public dans les salons du livre. Celles de Thierry attirent immanquablement l’attention alors que d’autres sont littéralement invisibles. Et même en argumentant, les livres ne partent pas si la couverture est « moche », comme on dit.

Question rituelle : quels chapitres vous ont procuré le plus de plaisir, ou au contraire des difficultés ?

Houlà ! Ça ne va pas être facile de se souvenir. Il me semble que le chapitre avec les affreux tachnides, dans les geôles de l’Empire des Mondes, m’ont agréablement fait frissonner d’horreur. Dans le premier Voyage, la scène d’amour avec Lizlide fut dans un autre genre très plaisante aussi à écrire. Quant aux chapitres difficiles… j’ai un peu de mal à répondre, car je n’ai pas le souvenir d’avoir « buté » de manière dramatique sur certains passages.

Le troisième tome des Voyages Extraordinaires sortira en octobre 2008, pouvez-vous nous en toucher quelques mots ?

Quelques mots oui, mais pas trop… Tout est parti d’une image, le souvenir du début du film Excalibur. Cela se passait dans une forêt, la nuit, et l’on assistait à un combat terrible de chevaliers dans leurs lourdes armures. Dans le prochain Voyage, on sera plongé dans une ambiance médiévale, mais un Moyen-Âge obscur, effrayant par sa brutalité et sa rudesse. Thédric part en quête de sa compagne du Royaume des 7 Tours, l’elfe Lizlide. Le problème, c’est qu’il ne sait pas dans quel infinimonde elle est retenue prisonnière (l’Imaginaire compte une infinité d’univers), ni comment s’y rendre en admettant qu’il l’apprenne, ni où la trouver ensuite, ni enfin comment en revenir. D’ailleurs, il est fort possible qu’ils n’en reviennent pas, auquel cas, il n’y aura pas de quatrième voyage.
Allez, une petite confidence, il s’intitulera, le Continent des Épopées.

Vous vous orientez depuis longtemps vers le registre jeunesse, quelles sont les difficultés d’un tel lectorat, selon vous ?

Je crois qu’il faut distinguer celui d’avant 12 ans et d’après. Dans les deux catégories, de toute façon, les exigences sont très grandes ; ça doit faire « tilt », sinon le lecteur zappe. Et comme nous sommes dans la génération zapping, pour garder l’attention du lecteur, il ne faut pas qu’il y ait de temps morts. Avant 12 ans, l’auteur doit être vigilant sur son écriture, de façon à ne pas être au-dessus du niveau de ceux qui vont lire son texte. Le vocabulaire peut-être riche, mais l’écriture pas trop compliquée, voire simple pour les plus jeunes. Personnellement, j’ai l’obsession de la fluidité et limite autant que possible les passages descriptifs. Au-delà de 12 ans, j’écris sans me poser de questions. En revanche, par rapport à un public adulte, je ne peux pas aborder certains thèmes, ou alors avec doigté pour ne pas être censuré. Par exemple, il est hors de question de parler politique, voire même de poser des sujets un peu trop polémiques. J’ai publié chez Oskar un roman de société (A mort l’innocent !) dont aucun « grand » éditeur n’a voulu, car (d’après ce que j’ai compris) « il faisait débat » (Un enseignant homosexuel accusé d’un meurtre sur fond de pédophilie... ) Dans un autre registre, le langage doit être châtié. Heureusement, il reste des éditeurs un peu moins craintifs avec lesquels il est possible d’œuvrer sans trop de censure.

Par extension, redoutez-vous de décevoir vos lecteurs, ressentez-vous une appréhension avant la sortie de vos romans ?

Il faudrait que je sois bien insouciant ou croire que je dispose du don d’infaillibilité pour ne pas m’inquiéter à chaque sortie de livre. Quand j’écris, ça va ; ce que je fais me plaît. Si l’éditeur édite mon roman, j’ai la faiblesse de croire que c’est parce qu’il n’est pas trop mauvais. Mais ensuite… c’est une alchimie que s’opère ou pas. Il y a tellement de facteurs qui entrent en jeu, une couverture ratée ou bien une date de sortie qui coïncide avec celle du tome 7 d’Harry Potter (ce qui m’est arrivé pour mon deuxième Voyage extraordinaire) et ça peut faire beaucoup de mal aux ventes. Ensuite, les critiques peuvent être féroces, parfois injustes, parfois pertinentes, et toujours ça touche en plein cœur (en positif comme en négatif). Avec l’expérience, on finit par se blinder un peu, un peu seulement, et à faire confiance dans le destin de ses « bébés ».

Parmi tous les lieux, les personnages et les ambiances que vous avez créés, lesquels préférez-vous, et pour quelle raison ?

Il est souvent un peu délicat de répondre à cette question, car au fond, mes héros, je les aime tous, même les « méchants ». Disons que je les apprécie d’autant qu’ils sont réussis dans leur genre. Thédric (peut-être parce qu’il y a un peu de moi en lui) et Lizlide sont forcément très attachants. Mais je ne suis pas mécontent du maître des Mondes Noirs. Cela dit, bien évidemment, mon affection va plutôt vers les bons et les beaux héros, parce que mon camp dans la vie, est du côté du bon et du beau, et plus que tout du sage (c’est d’ailleurs pourquoi j’ai tenu à aborder le thème de la sagesse dans le deuxième Voyage extraordinaire).

Vous  possédez un blog, où vous donnez régulièrement des nouvelles, internet est-il un outil important, selon vous, à la fois pour discuter avec vos lecteurs, mais aussi dans la documentation ?

Pas simplement important, il est indispensable. Internet est un outil de communication si formidable que je me vois mal m’en passer. Je m’en sers non seulement pour échanger avec mes lecteurs et pour rechercher des informations, mais aussi pour m’enrichir et me tenir au courant des événements du monde. Internet nourrit la curiosité insatiable de l’auteur.

Plus généralement, quels sont vos projets actuels ? Ou ceux que vous aimeriez concrétiser ?

Je me lance dans une nouvelle série, dans le genre héroic fantasy pur. Et je me régale ! J’ai par ailleurs un projet de nouvelles de guerre, nettement plus risqué sur le plan éditorial. Car en France, la nouvelle n’est pas très prisée. Je le ferai quand même. Il faut juste que je trouve le temps… entre deux romans.

Aimeriez-vous ajouter quelque chose, pour clore cette interview ?

Merci à vous, bien sûr, et aux lecteurs qui auront la gentillesse de lire mes réponses.
J’ajouterai juste une question : je me demande bien comment vont évoluer les métiers du livre, lorsque la révolution du numérique les touchera à leur tour ?
Ce n’est pas de l’utopie et c’est pour demain…

 

 

Propos recueillis par Sahagiel