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La Tapisserie de Fionavar

 

l'Arbre de l'Eté Titre : L'Arbre de l'Eté

Auteur : Guy Gavriel Kay (voir sa biographie)

Genre : Fantasy

Résumé du premier tome :

Ils sont cinq, femmes et hommes, tous vivant à Toronto au Canada ; ils sont jeunes, étudiants ou déjà dans la vie actives, tous rationnels. Or, les voici projetés dans Fionavar, le Grand Univers dont le nôtre n'est qu'une ombre bien pâle !
Malgré la protection offerte par Mantel d'Argent le magicien, ils sont aussitôt pris dans les premières escarmouches de la guerre qui oppose les forces des Lumières à celles des Ténèbres. Car Rakoth Maugrim, le dieu renégat, a trouvé moyen de se libérer de sa prison millénaire...

Critique personnelle du tome 1 :

Le début ne présageait guère d'innovations : cinq adolescents, menant chacun leur vie, se retrouvent bien malgré eux réunis par un étrange magicien. Celui-ci, nommé Mantel d'Argent, leur explique alors la raison de sa présence, et ses attentes quant à leurs destins. L'homme les invite ensuite dans sa dimension irrationnelle, Fionavar, un monde bien étrange où les héros se rendront pourtant de plein grès.

La grande force du roman se situe dans la capacité de l'auteur à créer un univers vraisemblable, animé par diverses tentions, soutenu par diverses mythologies, ce qui confère à l'œuvre un rien de magie. Cependant, on pourrait aussi reprocher à ce soucis du détail son côté convenu : un univers pétri de références mythiques, doté d'un rare sens de la justice et menacé par un ancien D.ieu, enfermé depuis des millénaires dans une prison mais en passe de plonger Fionavar dans un apocalypse de souffrances... what else ?

Guy Gavriel Kay nous abîme donc dans le registre épique, avec son lot allégé de batailles et de confrontations sanglantes, cependant manier le genre s'avère souvent délicat, et il suffit parfois d'un rien pour osciller du mauvais côté. Sans atteindre cet extrême, le premier tome se nourrit trop souvent de facilités, comme si l'auteur ne souhaitait pas particulièrement orchestrer son scénario, mais juste écrire une page de la fantasy, une page dont on ne saurait occulter la beauté, due en partie à l'écriture stylisée de l'auteur.

Le lecteur, après avoir dériver un moment sur le lit de cette poésie, se fracasse brusquement sur l'écueil de Fionavar pour ensuite s'échouer, un peu égaré, parmi le flot des personnages. On apprécie alors la psychologie travaillée des héros qui évoluent, s'épanouissent et se révèlent finalement à eux-mêmes. Aucun d'eux ne s'achoppent sur ces terres inconnues sans raison : tous auront leur rôle à jouer dans cette fantastique scène, avant que le rideau ne se baisse définitivement sur le tome.
En matière de personnages, Kay est loin d'atteindre la quintessence de ce qu'il est capable de faire, cependant on s'intéresse à leurs caractéristiques, plus ou moins recherchées ; ainsi, sans être un parangon d'originalité, on suit leurs pérégrinations avec attention, sans toutefois s'attacher particulièrement à eux. Et on peut noter là un défaut majeur du tome : pour une raison que je ne m'explique pas, je ne suis pas parvenu à m'immerger totalement dans la bulle de l'auteur, à véritablement m'immiscer parmi les personnages, à sentir pulser au fond de moi leurs aventures. Bien entendu, on ne s'ennuie pas, malgré quelques longueurs, néanmoins l'essence du roman ne prend pas encore sa forme définitive, son âme elle-même se pâme à certains chapitres pour céder le pas à une écriture assez creuse, sans vie propre. Ce sentiment subjectif, car après concertations avec d'autres lecteurs les avis semblent diverger sur ce point, me laisse toutefois une image trouble du roman, image qui se substituera peut-être à une autre dans le second volume, intitulé le Feu Vagabond, malgré mon indécision à poursuivre la trilogie.

Outre cette demie mesure et du fait des multiples personnages principaux, l'histoire adopte plusieurs points de vues, un éclatement narratif qui ne sera pas inopportun, permettant en effet de croiser les intrigues ... Cependant, l'aspect trop revu du scénario, qui rend divers hommage aux auteurs (notamment les références au cycle des Terres du Milieu, plus ou moins dissimulées, explicables par le long travail de Kay sur le Simarillion), la lourdeur de certains passages voulus dramatiques ou le rythme trop lent nuancent la qualité du livre.

Les bases sont solides, il paraît absurde de le nier, mais il manque un grain de folie pour satisfaire pleinement un féru de fantasy...

Note finale : 6.5/10

Sahagiel