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Fascination

 

FascinationAuteur : Stephenie Meyer (voir sa biographie)

Genre : Fantasy

Résumé du tome 1 :

Bella, 17 ans, décide de quitter l'Arizona ensoleillé où elle vivait avec sa mère, délurée et amoureuse, pour vivre chez son père, affectueux mais solitaire. Elle croit renoncer à tout ce qu'elle aime, certaine qu'elle ne s'habituera jamais ni à la pluie ni à Forks où l'anonymat est interdit. Mais elle rencontre Edward, lycéen de son âge, d'une beauté inquiétante. Quels mystères et quels dangers cache cet être insaisissable, aux humeurs si changeantes ? À la fois attirant et hors d'atteinte, au regard tantôt noir et terrifiant comme l'enfer, tantôt doré et chaud comme le miel, Edward Cullen n'est pas humain. Il est plus que ça, Bella en est certaine.

Critique personnelle du tome 1 :

Fascination, un livre qui fait couler beaucoup d’encre. Certains le considèrent comme une révélation jeunesse, le juchant sur un piédestal, d’autres l’exècrent sans compassion, mettant en relief ses défauts ou les raccourcis empruntés. Sur quelle analyse s’appuyer ? Comment envisager ce roman, dont le succès annonce déjà une adaptation cinématographique ?

Incontestablement, ce livre se destine à un lectorat jeune : nulle phrase ampoulée, nulle volte stylistique, nous restons dans le simple, le concret, le tactile. Si nous souhaitions établir une analyse hypercritique, à n’en pas douter cet aspect évoquerait une embûche : car à valoriser le limpide, l’auteur ne délaisse-t-elle pas la subtilité ? En réalité, ce roman s’étire selon une logique bien établie, avec un traitement consacré à son lectorat et mis en avant pour lui. Les personnages représentent ainsi des adolescents, dont nous suivons les tribulations sur une année scolaire, tandis que leurs relations, leurs égarements ou pensées façonnent leurs personnalités.
En particulier, le personnage de Bella, héroïne mais aussi narratrice, renforce les innovations : nous ne nous heurtons pas à une figure archétypale mais à une adolescente maladroite, énamourée au possible (ce qui lui confèrera, selon les sensibilités, un côté attachant ou agaçant), en bref : l’adolescente telle que la conçoit l’auteur. Un personnage proche de ses lectrices et qui saura charmer la plupart, tout en se réservant un caractère bien trempé, offrant aux plus réfractaires quelques surprises. Là où le bat blesse, c’est quand l’auteur décrit son environnement fantastique. Car pour innover, elle choisit non pas les elfes, les nains ou les orques, mais les vampires.

La fantasy vampirique se dotait déjà de livres solides, comme les œuvres de Joseph Sheridan Le Fanu, Wolfgang Hohlbein, Jeanne F. d'Arcier, Anne Rice ou Storm Constantine, aussi n’était-il pas aisé d’ajouter ses variables. À ce sujet, nous saluons l’effort fourni : les vampires conçus par Meyer s’avèrent plus humains que leurs homologues littéraires. En effet, ils suivent leurs cours au lycée, comme n’importe quel adolescent, entretiennent des relations avec leurs proches, effectuent des actions philanthropiques ou résistent au soleil. Par ailleurs, ils ne se refont pas à la vue du sang mais développent une autre philosophie, dans une volonté de vivre en harmonie avec les humains.

Malheureusement, ces constantes nuances ne contrebalancent pas leurs fondements : peau laiteuse, yeux changeants, attirance pour le sang ou beauté marmoréenne, ces qualités gorgent les pages à un débit inquiétant. Là où Bella frappait par son côté anodin, nous succombons aux constants rappels de l’auteur : oui, les vampires sont séduisants, oui, leurs haleines sentent bons, et oui, ils sont incontestablement magnifiques. Nous en arrivons à de tels stéréotypes, quand nous envisageons ces êtres pétris de qualités, qu’un sourire fend nos lèvres. Mais est-ce pour autant un couperet ?

En un certain sens, non, car une nouvelle fois l’auteur s’échine à modifier la donne, même si ses tentatives ne parviennent à convaincre tout à fait. Par exemple, l’histoire d’amour (autant vous prévenir, amateurs de projection sanguine passeront leur chemin, ce roman décrit sous tous ses aspects l’idylle amoureuse !) qui naîtra entre Bella et Edward, le vampire, nuancera les archétypes : soudain prompt aux défauts, son partenaire devient selon les chapitres très humain, en découvrant des sentiments telles que la jalousie, la détresse ou l’envie. Entre mort et passion, rejet et union, ces deux personnages constituent le grand atout du livre.

Au final, une lecture qui atteint son objectif : devenir un roman jeunesse abordable, plaisant et assez intriguant pour entraîner ses lecteurs. Sans être une perle d’imagination, ce livre comblera ainsi les adolescents (voire les personnes plus âgées, ne soyons pas sectaires !) et les confinera au rêve ; et n’est-ce pas une belle satisfaction pour un auteur ?

Note finale -jeune lecteur- : 7/10

Sahagiel

 

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Tentation

Titre : Tentation

Résumé du tome 2 :

" Tu ne me reverras plus. Je ne reviendrai pas. Poursuis ta vie, je ne m'en mêlerai plus. Ce sera comme si je n'avais jamais existé. " Rejetée par celui qu'elle aime passionnément, Bella ne s'en relève pas. Fascinée par un vampire, comment pourrait-elle retrouver goût à la pâle existence humaine ? Pourtant il faut vivre. Mais Bella n'a de goût pour rien, sinon le danger : alors elle entend la voix d'Edward, et éprouve l'illusion de sa présence.
Comme s'il ne l'avait pas abandonnée, comme s'il tenait encore à elle. Bella échappera-t-elle à cette obsession amoureuse qui la hante ? À quel prix ?

Critique personnelle du tome 2 :

Dans Tentation, l’auteur s’adonne aux risques. Finis chutes incisives ou atermoiements, intrigues poussives et révélations lentes à se démarquer, nous pénétrons dans un univers mieux cerné, avec un caractère qui commence à se définir, jouant tantôt sur le registre mélancolique, tantôt léger.

Les risques pris satisferont les lecteurs encore sceptiques. Loin de nous asséner une nouvelle idylle, l’auteur entraîne ses personnages dans des situations souvent périlleuses, sans verser dans la surenchère, néanmoins, et s’écarte ainsi des sentiers battus. Car Bella erre parmi les souvenirs, ne parvient à s’accrocher à la vie pour reconstituer son identité. Elle préfère sombrer, fermer les paupières, couper ces fils qui la relient à une existence désormais ingrate. Notre héroïne gagne en profondeur, voilà un atout ! Alors qu’elle semblait énamourée au possible, voire niaise selon les chapitres, elle endosse une cape plus hardie et n’hésitera pas, pour retrouver sa confiance, à se jeter à contre-courant. Expression à prendre au sens propre comme au figuré ! Vous l’aurez compris elle incarne le point fort du roman et, que ce soit à travers ses relations, ses réflexions ou ses problèmes, renforce l’intrigue avec elle.

Car dans ce volume, l’action s’alterne avec des moments propices à la sociabilité où les personnages évoluent, grandissent, mûrissent parfois. Ils nous réservent quantité de surprises, tour à tour agréables ou décevantes, mais toujours intéressantes. Bien sûr ce livre se destine comme son prédécesseur à un lectorat jeune. Aussi ne vous étonnez pas si quelques discussions vous semblent enfantines et les lacets du scénario quelque peu providentiels. Nous ne touchons pas à la fantasy épique, rationnelle et prêtant aux longues discussions philosophiques, non, cette série se classe incontestablement parmi la jeunesse et, ma foi, se taille une bonne réputation.

En l’occurrence, le scénario s’évertue à changer la donne. On pourrait toutefois regretter un final assez tardif, avec une entrée en matière toujours aussi lente, mais l’auteur atteint son objectif : gagner son lectorat, convaincre les autres, proposer une aventure à la fois touchante et intrigante, amusante et sérieuse. Elle étaye notamment plusieurs sujets d’actualité, concernant l’adolescence mais aussi l’âge adulte, quand on se voit confronté à la mort, à la détresse de voir un être cher abattu, la conscience qu’on a des autres, le regard qui pèse sur vos épaules si vous vous différencez, la notion d’amitié également, et dans quelle mesure cette amitié peut s’établir. Bref, tout en restant légers, car nous ne nous phagocyterons pas l’esprit, ces thèmes ourdissent un livre aux qualités nombreuses et affirmées.

Que dire sur le style ? L’auteur reste simple dans ses propos sans toutefois tomber dans l’élémentaire. Avec une plume aiguisée elle décrit villes, sentiments, personnages et surtout ambiance. Elle ajoute une touche toute personnelle aux mythes vampiriques, ce qui se manifeste par leur organisation hiérarchique mise en avant dans ce volume, et leurs valeurs fondamentales. Les déchirures qui scindent la race comme leurs ennemis se voient détaillés avec facilité, aisance et assurance. Quelques passages creuseront des rides, car il demeure des petites maladresses, mais dans l’ensemble nous adhérons ! Je retiendrai en particulier les derniers chapitres qui parviennent en quelques mots à vous plonger dans une atmosphère prenante tout en jouant sur le suspense et l’incertitude.

Au final, un second tome bien plus plaisant. L’auteur trouve ses marques, définit mieux ses personnages et son monde, s’acheminant vers un cycle jeunesse aux nombreuses qualités. Si l’ensemble ne change pas sa formule (lecteurs allergiques aux histoires d’amour adolescentes additionnées à une légèreté dans la forme et le fond, passez votre chemin !) mais se fortifie au fil du temps. De quoi alimenter les discussions jusqu’au prochain tome !

 

Note finale -jeune lecteur- : 7,5/10

Sahagiel

 

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Hésitation

Titre : Hésitation

Résumé du tome 3 :

"Deux futurs, deux âmes soeurs... C'était trop pour une seule personne. Je compris que ce n'était pas Edward et Jacob que j'avais essayé de réconcilier, c'étaient les deux parts de moi-même, la Bella d'Edward et la Bella de Jacob. Malheureusement, elles ne pouvaient coexister et j'avais eu tort de tenter de les y contraindre... À présent, je ne doute pas de ce que je désire, ni de ce dont j'ai besoin... ni de ce que je veux faire, là, maintenant."

Critique personnelle du tome 3 :

Hésitation se distingue grâce à une intrigue mieux construite et des personnages aux psychologies plus torturées, plus vivantes et touchantes. En particulier, les déchirures qui pavent leurs routes sauront ferrer le lectorat. Bella plonge une nouvelle fois dans une mer déchaînée où ses amis, sa famille, ses amours se démènent pour survivre ; nous ne pourrions manquer sa relation ambiguë avec Jake, dont on mesure à chaque page la maturité et l’embarras : l’un comme l’autre ne savent quelle décision prendre, s’ils doivent abandonner cette passion ou la vivre, ni s’ils s’engagent dans la bonne voie en choisissant le monde inhumain. Que d'aventures en perspective !

Bella voit ses peurs ressurgir avec ce tome : que ce soit les Volturi ou Victoria, ses ennemis gagneront en intelligence pour entrer en scène, de façon sournoise ou victorieuse, avec une aisance souvent remarquable. Le défaut inhérent à l’œuvre se répète toutefois : si nous établissions une hypercritique, nous pourrions résumer la série à ce schéma : alors que le début favorise les croisements entre personnages, le dernier quart voit l’affrontement se profiler, un affrontement toujours imminent et inévitable, dont on comprend l’importance dans les ultimes pages. Cet entêtement à réserver l’action au final coupera le lectorat en deux : ceux qui aimeront cette méthode, qui permet d’approfondir par ailleurs les personnages sans perdre en variété, et ceux qui se lasseront de toujours attendre pour enfin voir les intrigues se dénouer. Astuce à double-tranchant, donc, à laquelle on accroche ou non, ayant été pour ma part assez mitigé.

On félicite toutefois l’auteur pour le soin qu’elle apporte à ses créations. Tous auront leur quart d’heure de gloire, leur passé étayé et leurs relations complexifiées. Les chassés-croisés amoureux comme les sentiments se verront développés avec soin, de quoi alimenter les questions ! Le principal bémol s’axe sur la tournure prise par l’intrigue. Dommage que l’auteur se limite au triangle amoureux, figure maintes fois reprise, même si nous nous y attendions. Certes, jalousie et rivalité se taillent une place importante mais… une jeune fille qui se perd dans ses émotions, un fiancé aux prises avec le remord, un prétendant prêt à tout pour ravir sa dame… What else ?

Dans le camp vampire comme loup-garou, on en apprend toujours plus sur leurs coutumes et leurs légendes, leurs hontes et leurs aspirations. Dans ce tome en particulier les deux races gagnent en intensité. Nous savourerons un univers réfléchi depuis longtemps, à en juger la cohérence générale, où plusieurs bonnes idées renouvellent l’influence fantastique. Que ce soit organisation hiérarchique, mythes fondateurs ou dérives dangereuses, chaque tendance surprend.

Enfin, petit reproche qui ne tient pas à l’auteur mais plutôt à l’éditeur. Quand nous apprécions le succès réalisé avec cette série, nous attendons une édition parfaite, ou du moins épargnée par les coquilles. Malgré tout, depuis le premier tome déjà, les livres croulent sous les erreurs de pagination et les fautes en tout genre. Dommage car ça heurte la lecture !

Ajoutez à cela une fin fermée, car Bella n’hésite plus quant à son devenir, et nous obtenons une belle mise en bouche qui ne bouleverse certes pas le genre mais s’offre une qualité indéniable. Les adolescents comme les férus d’histoire d’amour seront aux anges et les autres, ma foi, passeront sans doute un bon moment !

 

Note finale -jeune lecteur- : 7,5/10

Sahagiel