Retour vers la page des critiques

 

Les Chroniques des Féals

 

Coeur de Phoenix Titre du cyle : Les Chroniques des Féals

Auteur : Mathieu Gaborit (voir sa biographie)

Genre : Fantasy

Résumé du premier tome :

Il est un endroit légendaire, au coeur de l'empire de Grif, dont on ne parle qu'à voix basse: la Tour Ecarlate. Un donjon de pierre rouge entouré de crainte et de mystère.
Cette tour est la demeure des phéniciers. Ces mages, depuis la nuit des temps, gardent un terrible secret qui s'avéra vital dans la guerre qui s'annonce.
Januel est l'un d'eux. Il a été choisi pour faire renaître le phénix de l'empereur, afin de sceller l'alliance des royaumes contre leur ennemi surgi du domaine des morts: la Charogne.
Mais c'est un drame qui attend le jeune homme et qui le jette sur les routes, seul face à son destin...

Titre des romans composants le cycle:

1- Coeur de Phénix
2- Le Fiel
3- Le Roi des Cendres

Critique personnelle du cycle :

Mathieu Gaborit, auteur français, s'est imposé dans le genre avec des livres comme les Chroniques des Crépusculaires ou encore bohème. Ainsi, c'est avec une certaine curiosité que je me suis lancé dans la lecture de cette trilogie d'or et déjà traduite en plusieurs langues.

En premier lieu, l'originalité et l'imaginaire fleurissant de l'auteur frappent l'attention. Pas une page ne se tourne sans un grain d'innovation ou une pincée de magie. Le côté épique de cette œuvre nous ouvre les portes d'un monde fouillé, notamment avec son système de guildes possédant chacune des caractéristiques différentes. A vrai dire, le simple principe de régénérescence des Phénix, éveillés de leurs cendres par le doigté des phéniciers, s'avère riche en surprises. Leur univers très personnel se révèle ainsi au fil des tomes, dévoilant les antiques pouvoirs d'une guilde au concept innovateur. Vous l'aurez compris, la créativité de l'auteur réussit encore, certes avec plus de retenue que dans ses précédents romans, mais avec charme suranné dont on ne pourrait se passer : le monde s'étoffe peu à peu, les différents peuples disposent tous de leur quart d'heure de gloire (mention spéciale aux Licornéens lors de leurs équipée) et en fin de compte, les différentes nuances émaillant l'aventure nous ravissent autant par leur ingéniosité que par leur présence, aussi infimes soient-elles.

Car ce monde n'est pas sans surprises : outre les phénix, dragons, licornes, griffons, chimères, pégases, aspic ou tarasque, le grand ennemi du roman, à savoir la Charogne, gagne en importance au cours des tomes. Alors qu'ils semblaient secondaires, voire effacés par moment, notamment dans le premier volume, la tension et le suspense montent crescendo dans les deux suivants, nous apportant même quelques chapitres, peut-être trop rares, malheureusement, dignes de grands romans anglo-saxons. La qualité croissante de la trilogie ne peut toutefois occulter certains points noirs, comme les passages tournant à vide, ou le scénario trop axé sur les périgrinations de Januel, véritablement candide et insupportable à l'ouverture.
Au deçà du héros, d'autres personnages paraissaient sous-exploités, telle la guerrière Dragueénne, Scende, qui redorera cependant son blason lors du Fiel. Cet arrière goût amer ne s'effacera pas vraiment au fil d'une œuvre trop souvent marquée par ces manques. Comment expliquer ce sentiment diffus ? Parfois, on regrette que les choses ne soient pas plus approfondies, que les protagonistes ne soient pas mis plus en avant ou que les révélations ne soient pas mieux traitées. Néanmoins, l'intrigue se complexifie passés les deux cents premières pages de l'intégral, et le suspense suffit alors à galvaniser un lecteur sur sa faim. Par exemple, l'amplitude renversante du dernier tome, nous jetant d'entrée de jeu sur les Terres de la Charogne, ne laisse pas indifférent. On ressent alors tous les enjeux de l'intrigue tandis que le dépaysement apporté par certaines contrées pousse plus loin le rêve.

Car le M'Onde et ses personnages évoluent avec la trilogie. Tout d'abord, on ne peut manquer la maturité croissante du héros Januel. A première vue naïf, candide, trop innocent face à son destin, il finit par affronter ses ennemis lors des confrontations parfois très braves, même quand elles sont synonymes de révélations douloureuses (on pourrait noter à ce propos une dissémination des révélations trop en évidence. Certaines sont en effet prévisibles, tendant à alourdir la fluidité du roman). La relation qu'il établie avec Le Phénix Impérial, elle, rythme une grande partie du roman, apportant une perspective nouvelle, agréable à suivre. Néanmoins, l'archétype du « jeune-héro-confronté-à-des-forces-qu'il-devra-maîtriser-pour-préserver-son-monde » rôde toujours, fleuretant souvent avec la limite du manichéisme, celui-ci étant principalement évité grâce aux ajouts du Fiel, nous présentant le monde de la Charogne.
Les autres personnages abattent leur carte surtout à partir du second volume, et on pourrait par exemple noter Scende dont le caractère s'éloigne du cadre stéréotypé par la suite, ou encore Sildinn dont le sort, étonnement, m'a marqué au cours de la lecture.

Alors oui, Mathieu Gaborit crée des mondes enchanteurs, avec une plume toujours très propice au merveilleux, mais il n'y a pas cette touche de poésie si admirable dans les Chroniques du Crépusculaires, où le mot virtuose ne pouvait pas mieux convenir. Une petite déception, donc, cependant le roman reste d'une qualité certaine, et il serait dommage de passer à côté pour ces défauts.

Note finale : 6.75/10

Sahagiel