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King Kong

 

Titre original : King Kong

Réalisé par : Peter Jackson

Avec: Naomi Watts, Jack Black, Adrien Brody

Genre : Fantastique, Aventure

Durée : 3 heures

Date de sortie : 14 décembre 2005

Film américain.

Synopsis :

New York, 1933. Ann Darrow est une actrice dont la carrière semble toucher à sa fin. Quand elle rencontre Carl Denham, un explorateur-réalisateur, elle accepte de tourner dans son film d'action et se laisse sans réfléchir entraîner dans une aventure des plus périlleuses. Elle ne sait pas que le rêve et le but secret de Denham est d'être le premier homme à explorer Skull Island... Une île légendaire...

 

Critique personnelle du film :

" J'avais 8 ou 9 ans. L'impact fut tel que je décidai sur le champ de devenir réalisateur. Je me suis dit : " Je veux faire du cinéma, je veux être capable de faire des films comme King Kong". Peter Jackson réalisa son rêve trente-cinq ans plus tard, après maintes tentatives... "Il peut sembler étrange que King Kong ait fait partie de ma vie si longtemps, qu'il soit depuis 35 ans mon film favori. Pouvoir le refaire aujourd'hui, c'est concrétiser un rêve incroyable, que je n'aurais même pas osé imaginer. Ma dette à son égard n'a fait que croître, car c'est ce film qui m'a orienté vers la réalisation et a été le moteur de ma carrière. Tourner cette nouvelle version m'a permis de l'en remercier et de lui rendre hommage."

La réalisation du film par Peter Jackson, reconnu à travers le monde pour ses talents en matière d'imagerie numérique ou de prise en charge de projets colossaux, avait de quoi émoustiller le public. Surtout que cette fois, il s'agit d'un remake de King Kong, film épique né de l'imagination de deux hommes : Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack. Alors comment Peter Jackson allait-il s'en tirer ? Car avant d'être une production fantastique, King Kong évoque une histoire d'amour impossible entre la belle et la bête, souligne l'insatiable soif de domination de l'être humain et ne s'exempte pas d'une certaine ironie... Ces facettes à double tranchant n'ont toutefois pas effrayé le réalisateur, qui aime décidément se lancer dans de grandioses projets.

A ce titre, les rappels à l'oeuvre originale sont nombreux, de la scène d'ouverture présentant un New York meurtri par la grande crise, en passant par le suivi très fidèle du scénario et la pléthore de scènes devenues cultes, notamment les biplans tournoyant telle une horde de guêpes au sommet de l'Empire State Building.
Si le réalisateur souhaite marquer la continuité entre la source et son remake, il parvient tout de même à innover, en créant d'une part un univers complet et en instaurant d'autre part une forme de tension, de suspense qui tient en haleine le spectateur. Bien sûr, la griffe du réalisateur se sent à travers l'humour, le côté introspectif du film, quand il s'agit de retracer les débuts de la comédie, du théâtre ou du cinéma, sa réflexion sur l'art ou la mise en abyme des personnages.
Néanmoins, il n'en oublie pas les passages obligés du film : si les vingt premières minutes se centrent autour des protagonistes, dans l'efflorescence d'émotions qui étreignait alors les américains, cela suffit à les ancrer, à évoquer leurs différences, leurs caractères ou leurs objectifs sans sombrer dans la longueur.

Et en effet, le film a beau durer près de trois heures, on ne s'ennuie guère au cours de la projection. Les différents plans ou la succession de péripéties gardent en éveil le spectateur, quand bien même s'agit-il de rebondissements improbables, tirant plus sur l'humour que le réalisme. Et quoi de mieux pour ferrer un public que les effets spéciaux ? Peter Jackson semble l'avoir compris et son film en fait bombance : toutes les scènes s'agrémentent d'images numériques, parfaitement réalisées, tandis que le gorille incarne une prouesse technologique. Le moindre de ses poils, la plus infime expression, rendent coi les plus critiques. Personne ne pourrait le nier, Peter Jackson marque un grand coup avec sa bête mythique, car jamais jusqu'alors nous n'avions pu apprécier autant de détails, de soin, de réalisme apportés au numérique.

L'aspect romantique qui lie Ann, capturée par le singe, et King Kong ne s'exempte pas de subtilités et d'émotions, cette relation étant sans doute la plus fouillée du film. Or on pourrait discerner là un défaut majeur : si le réalisateur s'appesantit sur cette union, il en oublierait presque les autres protagonistes. De fait, on apprécie bien moins leurs caractères, parfois façonnés sur des archétypes malgré des interprétations de qualité. A ce titre, notons le jeu de Jack Black, qui s'empare de son personnage Carl Denham pour en faire un réalisateur mégalo, dont les évènements dramatiques ébranlent l'assurance puis renvoient au diable ses prétentions d'artiste... Un personnage qui ne sera pas sans rappeler Orson Welles, comme l'explique l'acteur : "J'ai beaucoup réfléchi à ce rôle. Je me suis demandé si Peter ne m'avait pas choisi en raison de nos similitudes physiques : nous avons à peu près la même taille, la même carrure, et voilà qu'il me confie un rôle de réalisateur ! Serait-ce qu'il se reconnaît en moi ? J'ai alors eu l'idée de baser secrètement mon interprétation sur lui, mais j'ai vite compris que ce n'était pas la bonne approche. Peter n'a aucune des angoisses de Carl, aucune de ses obsessions ou de ses crises de colère. Et il est certainement dans une situation moins désespérée que Carl.
J'ai alors pensé à faire de Denham une sorte de P.T. Barnum, mais Peter avait un autre modèle en tête - pour faire court, un Orson Welles au petit pied. Carl se prend pour un artiste maudit. Il a un ego monumental et espère être reconnu un jour, mais, au fond, il a peur de ne jamais arriver à rien. C'est cela son vrai moteur."
Peter Jackson précise ses intentions pour le rôle :" Nous avons pris pour référence le jeune Orson Welles du Mercury Theatre. Carl a cette énergie bouillonnante et contagieuse, cette détermination inflexible à réaliser son film par tous les moyens possibles et imaginables. Il est ambitieux et un brin escroc... comme Orson qui n'hésitait pas à utiliser pour tel ou tel de ses projets l'argent qu'il avait obtenu pour un tout autre film"

Ajoutez à cela une immersion bienvenue dans le film, un éventail d'acteurs talentueux, entres autres Naomi Watts, Jack Black, Adrien Brody, Andy Serkis, à qui nous devons la gestuelle de Kong, ou encore Thomas Kretschmann, des décors plus que convainquants, un bestiaire somme toute horrifique (avis aux jeunes spectateurs : si vous n'aimez pas les monstres anthropophages ou les insectes phalliques, passez votre chemin), et vous obtiendrez le cocktail phare du film.

Une oeuvre pour ainsi dire réussie, qui nous plonge dans l'univers suranné du Kong, et nous donnerait presque envie de visiter Skull Island.

 

 

Note finale : 3/5

Sahagiel